15 février 2009
Le Chef de la propagande
Je viens d’entendre Monsieur Fillon à la télévision comme tous les français sans doute et cela sur toutes les chaînes. Je vous rappelle pour ceux qui aurait pu l’ignorer que c’est notre premier ministre, car il est vrai que dans le contexte actuel on avait oublié qu’on en avait un. . Dans cette intervention du 10 février 2009, il présente le mouvement social guadeloupéen comme étant le seul à exister, sans faire mention du mouvement martiniquais qui sévit depuis maintenant 6 JOURS dans l’île, comme s’il n’avait jamais existé. Quel est l’objectif ?
Manipuler l’opinion publique française en faisant croire qu’il s’agit d’un mouvement local isolé .
Car si on faisait comprendre que la Martinique ET la Guadeloupe sont toutes les deux dans un climat de grève générale, avec au cœur de leurs revendications la question du pouvoir d’achat et de la vie chère….que l’île est rythmée quotidiennement de nombreuses manifestations, que toute l’économie est bloquée, que les stations services ne fonctionnent plus, que la circulation par conséquent est limitée, que les personnes n’hésitent pas à marcher pour se rendre aux manifestations… La France pourrait s’en émouvoir….
Comment Monsieur Fillon peut-il ignorer cette situation ?
Non, il ne l’ignore pas, mais ils ont peur (au gouvernement) … de la contagion dans la France hexagonale….
Peur d’un mouvement qui peut faire boule de neige
Ce genre de démarche dénote un manque de culture évident :
– C’est ignorer que la Martinique est le second département le plus densément peuplé de France juste derrière l’Ile de France. Et donc, nous sommes nombreux, et une partie de notre communauté est en métropole, nous communiquons avec nos familles en métropole car nous en avons tous. Les choses ne tarderont pas à se savoir, c’est donc un secret de polichinelle et cela risque de lui revenir au visage, comme un boomerang.
– Monsieur Fillon ignore qu’Internet existe aujourd’hui
Il est fort possible que les réunionnais nous rejoignent. J’aimerais bien voir si ces faits seront à nouveau masqués par la propagande menée par le gouvernement actuel. Car il ne s’agit plus de communication mais bien de manipulation, on cache aux français une partie conséquente de la vérité.
Ce choix de communication ne peut que conduire à des résultats désastreux.
Le risque en Martinique est grand, il est vécu comme une manière de nier, de minimiser le mouvement. Cela risque d’envenimer le climat ici qui pourrait se transformer en véritable insurrection. Le mouvement ne peut que se renforcer avec une telle attitude.
Il semble que le gouvernement de Monsieur Sarkozy ait été nourri de la pensée de Monsieur Bernays. Petit rappel pour ceux qui ne connaissent pas Edouard Bernays. C’est celui qui a mis au point au début du XXème siècle ce que les américains appellent le « spin » en publicité, c’est-à-dire la manipulation, c’est lui qui a mis au point une forme d’interprétation et une présentation partisane des faits. Je vous en illustre un exemple actuel. Monsieur Sarkozy est à 31% d’opinion favorable. Voilà une information partisane car elle cache la volonté de limiter l’impact de la chute de Monsieur Sarkozy dans les sondages, car la véritable information est que Monsieur Sarkozy est à 69% d’opinion défavorable.
Autre exemple, on vous montre un mouvement social, par exemple de millions de personnes dans les rues, cette image dure quelques secondes, plan large, on n’interviewe pas ou peu les intéressés, puis second temps on interviewe une personne qui est gênée par le mouvement. Gros plan, plusieurs secondes. Vous avez une tendance naturelle à vous projeter et à vous assimiler sur la seconde personne. Le mouvement vous apparaît lointain. Vous vous mettez à la place de la personne incommodée. Le véritable événement est masqué et minimisé : « des millions de personnes dans les rues » et mis sur un plan d’égalité avec un non-événement crée de toute pièce : une personne incommodée (fatalement les grèves servent aussi à gêner pour que les mouvements soient entendus).
C’est de la manipulation et on a sans cesse ce genre de communication dans les télévisions privées genre LCI, TFI qui ne sont pas neutres, car ce sont des télévisions avec des opinions affichées nettement à droite, vu leurs propriétaires, il ne faut pas s’attendre à une information neutre.
Vous avez l’impression que tout cela est très naturel » mais ce n’est pas le cas. Le choix des mots n’est pas innocent. La manière dont les images vous sont montées, présentées non plus.
Hier (le 9 février) sur LCI le mouvement martiniquais est complètement passé à la trappe. Doit-on en conclure que les journalistes de LCI ignoraient le mouvement martiniquais ? Je n’en crois pas un traitre mot. Là encore manipulation. On ne présente pas le mouvement, donc, il n’existe pas. Ils pensent à tord, que les martiniquais vont se lasser. Non, ce ne sera pas le cas.
Les derniers maîtres de la Martinique.
Le climat social est d’autant plus dangereux que le reportage de Canal + « Les derniers maîtres de la Martinique » n’est pas pour calmer le climat. Certains békés ont d’ailleurs bénéficié d’une protection de la gendarmerie …..vu qu’ils auraient eu des « menaces ». Ils ont eu des menaces ou ils se sentent menacés ? Il faut rappeler pour nos compatriotes français qui ne connaissent pas forcément le fonctionnement économique de l’île que la grande distribution est en grande partie entre les mains des békés de l’île. Dernier bastion de l’esclavagisme ? Car en réalité c’est une manière d’asservir en appauvrissant. Mais on attend de l’Etat d’y mettre son nez, sauf si l’Etat avait des intérêts « personnels » à ménager les békés… On s’est toujours demandé pourquoi les membres des différents gouvernements débarquaient toujours dans des champs de bananes dès leur sortie de l’avion. La Martinique c’est donc pour le vulgus « Bananaland ». On oublie que 85% de l’activité économique de l’île est générée par les services et non pas par l’agriculture (la fameuse banane) et que le secteur de la banane emploie une quantité insignifiante de familles martiniquaises….
Si vous demandez à un enfant de la Martinique ce qui est important pour l’économie de l’île, il vous dira sans sourciller : la Banane.
Ah la banane, c’est ça la propagande. Békéland et Bananaland. Même si on sait que les deux sont anecdotiques mais il nous faudrait pour l’un et l’autre remettre les choses à leur juste place.
Dans ce contexte où certains békés se sont laissés aller à dire tout haut ce qu’ils avaient la discrétion de penser et de dire dans un cadre privé, la population martiniquaise est agacée. On subit un groupe d’individus qui fait la loi dans l’île en matière de prix, qui contribue à notre appauvrissement en pratiquant des prix exagérés. Tout le monde connaissait bien leur monde à eux, leur mode de vie de caste sclérosée sur elle-même, désuète et dépassée qui ne ressemble à rien dans un monde qui vient d’élire pour président de la première puissance mondiale un métis émigré de la seconde génération. Ne se sentent-ils pas ridicules dans un tel contexte ? Il y a de quoi se sentir minables. Comment vont-ils s’en tirer dans une pareille crise ?
La Guadeloupe a connu une reforme agraire en 1983, alors que la Martinique n’a jamais eu de réforme de ce type. Je rappelle que les familles békées détiennent une grande partie des terres de l’île. La réparation des insultes et des erreurs commises dans le passé pourraient bien justifier une petite réforme agraire, non ?
Dans cette situation de crise où nous sommes au centre de l’actualité on voit clairement comment les télévisions fonctionnent … et on est consterné !
Quand on se fait l’allié du mensonge et du mépris , cela ne peut que provoquer un climat explosif, car c’est seulement en faisant preuve de respect qu’on peut amorcer un véritable dialogue.