Jeanne-d’Arc TURCOTTE

J’ai l’impression que je me suis fait jouer un tour. On m’a demandé dix minutes, et puis là je vais en avoir vingt. Mais on ne met pas treize ans de mission ni cinquante ans de vie en vingt minutes. Alors ça va peut-être faire un peu bousculé. Pour être bien fidèle à ma mission (parce que je crois bien que le problème de tout le monde, c’est la mission), je devrais, premièrement, vous donner mes racines profondes.

Mes racines profondes

Je suis Amérindienne, née à Odanak, pas tellement loin, disons une centaine de minutes de Montréal. Ma mère était écossaise française : ça fait tout un mélange ! Mon père m’a toujours dit que j’étais la plus sauvagesse de la famille. Sur onze enfants, ça doit être quelque chose ! Je dis ça parce que ces racines-là ont vraiment orienté ma vie.

Papa, pour pouvoir aller à l’école, devait perdre son statut d’Indien : il devait perdre son numéro en fait, parce que quand on est Amérindien, on est un numéro, on n’a pas de nom. Alors il a dû tout simplement renoncer à son numéro, renoncer à sa langue, renoncer à ses droits, enfin à tout ce qui fait qu’un homme est un homme dans un peuple quelconque. Parfois, je me demande si je lui pardonne ou pas. Ça fait seulement deux ans de ça: avant je pensais que c’est bien le fun. Et pour pouvoir être instruit, jusqu’en 1958, être Indien enlevait le droit d’aller à l’école supérieure. Ça c’est au Canada mais pas en mission… je m’excuse, le Canada est vraiment une mission pour moi. Je pense que quand on revient ici et qu’on dit qu’on n’est pas en terrain de mission, je pense que je pourrais démontrer le contraire. On est vraiment en terrain de mission ici. Et jusqu’en 1973, aller prendre un verre de bière au coin, pour un Amérindien, était passible de prison. Et celui qui vendait la bière était simplement passible d’une amende. Ça ce n’est pas au Chili, ce n’est pas ailleurs qu’ici. Disons en 1973, c’est avant-hier.

Ce qui caractérise l’Amérindien, c’est sa liberté de pensée, sa liberté d’être et puis ça, mon père l’avait à 100 %, je pense. Homme d’Église oui, mais qui pouvait critiquer sinon le pape, au moins les évêques. Pour lui, le Bon Dieu c’était un gars qui a de l’allure, qui a du bon sens, qui est capable de comprendre. Pour lui, le bien se situait dans ce sens-là. C’était tout à fait personnel.

L’école nous a meurtris nous aussi parce que papa était Amérindien. Il ne fallait pas le dire. On demeurait dans un patelin assez petit où tout le monde se connaissait. Si tout le monde l’avait su, surtout les professeurs, que notre père était Indien, eh bien on se serait fait mettre dehors. L’Indien était le gros méchant qu’on voit encore dans les fameux films de cow-boy : c’est toujours lui l’insignifiant qui se fait mettre dehors. Je me souviens d’avoir tapé du pied (un peu, pas trop fort), dans le fond de l’école pour dire, pendant les chers cours d’histoire du Canada : « Il n’est pas comme ça, vous avez menti », parce que mon père pour moi c’est un homme extraordinaire. Alors jusqu’à l’école secondaire on avait à subir de s’entendre dire (parce que ça venait souvent dans les cours d’histoire du Canada), que l’Indien était comme ci et comme ça… On le dit encore d’ailleurs !

La mission

Alors ce désir, je ne dirais pas de révolte, mais ce désir de défendre ceux sur qui on passe, qu’on piétine, je l’avais au fond de moi. Et je l’ai découvert où? Je l’ai découvert en mission. C’est vraiment là que j’ai découvert qui j’étais, moi ! D’abord, j’étais entrée au couvent pour être missionnaire. On était trop pauvre chez nous, on n’aurait pas pu aller autrement défendre ceux qui en avaient besoin. C’était pas la raison première, mais c’en était au moins une. Si j’étais religieuse, c’était pour être missionnaire. Puis j’avais prié jusqu’à l’âge de 21 ans pour jamais être une sœur. C’était compliqué mon affaire ! Mais en fin de compte, j’y suis parvenue et je suis très heureuse. À ce moment-là, c’était pour défendre les mal pris et je peux analyser aujourd’hui que c’était là la mission pour moi.

Je suis partie pour la Papouasie. La Nouvelle Guinée, puis la Papouasie ne font qu’un seul pays indépendant depuis quatre ans, pas tellement loin de l’Indonésie. J’ai même enseigné l’histoire de l’Indonésie assez longtemps. Je suis arrivée là-bas, dans la province la plus au nord, donc celle que les Européens (enfin, les Peaux blanches), n’avaient pas vu, excepté pour la guerre, la dernière guerre mondiale. L’Australie s’était battue avec le Japon. Évidemment, on ne se bat pas chez soi, ça détruit trop de choses. On s’est battu chez le voisin, qui était en haut: on est venu se battre chez nous. Alors les gens avaient connu le Blanc sous une drôle de façon : celui qui détruit. C’est là qu’on a été envoyées.

À l’écoute de la Papouasie

Il y a 600 langues, 600 dialectes différents, 600 tribus. Là j’ai vraiment compris que le féminisme, ça peut exister. C’est un petit peu osé ce que je vais dire, mais j’ai vécu dans des tribus matriarcales, j’ai aussi vécu dans des tribus patriarcales. Quand j’étais dépressive, je changeais de tribu ! Mais le pire c’est que j’étais jamais longtemps, je revenais plus vite. Parce que je me rendais compte que les tribus matriarcales, c’était beaucoup plus dur. J‘ai pas de complexe d’être une femme, je n’y ai même jamais pensé. Je trouve ça curieux qu’une femme puisse le penser. Mais je ne sais pas, ça me pose des problèmes, en regardant en arrière, de voir que ces tribus qui étaient très dures, c’étaient des tribus matriarcales. Il faut peut-être y penser…

Alors je suis partie. N’étant jamais prophète dans son propre pays, j’ai pensé : « Je vais aller faire le prophète ailleurs ». Me voici en mission : partie avec deux gros baccalauréats, j’étais vraiment là pour leur enseigner comment se prendre en main; j’étais vraiment là pour leur dire comment on fait pour partager. J’avais toutes les solutions à tous leurs problèmes économiques (de l’argent au Canada, on en a; alors envoyez-m’en !).

Ça n’a pas pris grand temps, je me suis sentie très à l’aise. On m’a enseigné une chose tout de suite au début : c’est que je parlais très bien l’anglais, mais qu’eux autres ne le parlaient; que je parlais très bien le français, mais qu’eux autres ne le parlaient pas non plus; alors qu’il fallait que j’apprenne leur langue ! Ça s’apprend assez facilement leur langue, enfin celle qui a été adoptée, le pidjin. C’est assez facile pour un français de le comprendre, mais pour le parler, c’est une autre histoire ! J’ai donc appris à écouter. J’ai été heureuse d’entendre Bertrand Roy dire tout à l’heure que son devoir, son travail, ça va être l’écoute. C’est vraiment là la clé pour moi. Et ce qui m’a beaucoup aidée à comprendre, ça a été l’écoute. Je pouvais écouter et non pas parler. Je me souviens des midis, au lieu d’aller dîner au couvent (on avait la Société des Nations Unies chez nous, on était cinq de nationalités différentes), j’entrais dans des villages pour aller jaser. Pas jaser, écouter les gens.

Les grandeurs de l’homme primitif

Et c’est là que j’ai découvert mon père et que j’ai découvert, peut-être, les grandeurs de l’homme qu’on dit primitif. L’homme dans sa culture tout près de la nature. Alors toutes ces grandeurs-là, je les ai apprises en mission : la grandeur de l’homme capable d’aimer, de partager (de partager ses riens), la grandeur d’être un homme. (Quand je suis revenue à Montréal, ça j’ai trouvé qu’on ne l’avait plus. Qu’est-ce que c’est vraiment qu’un homme?) Et puis la grandeur de l’homme qui croit en l’homme. J’ai découvert aussi que cet homme-là était très près de Dieu. Et que par cette voie-là, on pouvait entrer dans notre foi, par tout ce qu’il y a de plus profond chez l’homme. Ce sont ces hommes qu’on appelle primitifs qui nous l’ont fait découvrir. Je suis revenue, après dix ans, plus sauvage que quand j’étais partie.

J’ai découvert aussi que la vérité, c’est eux autres qui l’avaient. Ce n’était pas moi avec mes gros diplômes ! La vraie vérité, pas les grandes phrases ! Parce que pour eux, aimer c’est pas dans la tête, la foi n’est pas là non plus. La foi est au niveau du cœur, au niveau de tout l’être, et puis l’amour aussi. En tout cas, je me suis sentie très bien là-bas, parce que je me suis sentie très acceptée. Peut-être parce que je parlais pas, mais ça s’est transmis par osmose. J’en ai eu des témoignages assez souvent disant : « Toi t’es pas comme les autres ». Mais des fois, ça coûte cher ne pas être comme les autres. T’as la peau blanche, mais le restant c’est pas pareil ! Alors c’était probablement les racines, mes racines amérindiennes qui revenaient. Alors la vérité avec eux, c’est là que je l’ai découverte.

On s’est rendu à l’école secondaire, on est arrivé avec d’autres problèmes. Disons, j’ai découvert la force positive et la force négative des classes sociales. Parce que là aussi il y en a des classes sociales. La force positive de la classe sociale, c’est que dans un clan on se téléphone; et dans des clans qui étaient pauvres, il n‘y en a pas un qui manquait plus que les autres : on savait partager les uns avec les autres. Et puis le côté négatif, vous le connaissez aussi bien que moi, je n’ai pas besoin de l’expliquer. Alors ce qu’il me restait à faire, le point de vue de la foi, c’était de faire grandir la relation entre les classes, de renforcer cette relation-là qui existe entre les différentes classes, qui existe aussi entre les tribus.

Changer les structures d’Église

En 1978, me voici de retour au Canada, parce que j’ai été mise dehors (la Société des Nations Unies, c’est pas toujours facile !). Alors, comme on était arrivés deux ou trois Irlandais, on avait décidé de changer des structures. Ce qui est arrivé, c’est qu’on a demandé à notre cher évêque : « Est-ce qu’on pourrait faire une analyse avec les gens du pays? Comment ça devrait marcher l’Église? » Parce que ça ne collait pas trop avec Vatican II. Quand on a changé du latin à une langue populaire, les gens ont dit : « Vous avez brûlé nos églises. Puis, vous nous avez dit que ce qu’on croyait avant, c’était pas bon. Et maintenant, vous changez votre religion, donc la vôtre n’était pas bonne non plus ! » C’est clair, c’est très logique. Alors pour faire comprendre, on a demandé aux gens ce qu’ils en pensaient et on est allé de village en village, on a formé des comités, tout le monde s’est assis et puis ils nous ont dit des vérités qui étaient très vraies, que tout le monde n’a pas nécessairement pris. Le résultat, ça a été la critique verte de l’Église avec ses pouvoirs. Et puis ça nous a aidés à changer les choses dans notre coin. En tout cas, les professeurs blancs sont devenus de différentes couleurs ! On les a changés. Deo Gratias, si on peut utiliser le latin ! Parce que quand je suis partie, il n’y avait pas un seul étranger qui enseignait à l’école primaire. Il y avait même plusieurs autochtones qui étaient rendus à l’école secondaire. Ça c’est vraiment quelque chose, car ce n’est pas facile de déloger les gens de là. Et puis, nos infirmières étaient peut-être moins bien qualifiées, mais elles étaient du pays.

En plus de ça, il y avait des jeunes filles qui voulaient être religieuses, imaginez. Alors les communautés qu’il y avait là ont refusé. « Non des petites indigènes comme ça, non, pas possible ! » Il y avait huit communautés, tout le monde a refusé. Alors l’évêque a demandé à plusieurs : « Est-ce que quelqu’un pourrait pas s’en charger? » J’ai pas à me glorifier de ça parce que j’ai été la dernière à qui il en avait parlé, mais j’ai été la seule à dire oui. Alors j’ai dit : « D’accord, je vais prendre ça, à la condition que vous donniez trois ou quatre ans pour me mettre au point. Je vais vivre avec elles et puis là, après ça, après trois ans, on verra… » Alors qu’elles étaient prêtes, après avoir dit qu’il valait mieux que les religieuses soient autochtones, après avoir voulu former une Église qui serait la leur, avec la politique qui avait été décrétée par les gens du pays, au service des gens, à l’écoute des gens, etc. alors on a décidé d’intégrer ces futures religieuses à une communauté européenne ! Heureusement, elles ont toutes refusé. Alors moi, il y avait juste une chose à faire, il y avait la porte qui me restait.

Missionnaire en Haïti?

En l’espace de dix jours, tout a été changé. J’ai été parachutée au Canada, c’est le cas de le dire. Je me retrouve donc à Montréal, mon pays d’adoption. Je me sentais vraiment drôle, pas tellement bien dans ma peau. Je me suis dit : « Bon, faut tout de même faire quelque chose ». J’ai regardé : des pauvres, il y en a pas mal si on s’ouvre les yeux; savez-vous qu’il y en a plus qu’on pense? Le Canada n’est pas si riche que ça.

Mais j’avais tout me même cette hantise des missions. (Là je vais me couler à pic sous peu probablement). Alors on a demandé à Rome la permission d’ouvrir une mission en Haïti. On n’a personne là. Alors la provinciale, peut-être pensant faire un bon choix (mais elle s’était trompée) m’envoie avec une autre compagne en Haïti. C’était l’an dernier, au mois de juillet. On a fait le tour. Ma compagne, en arrivant, a fait une allergie à la chaleur tropicale. Après avoir fait le tour, bien là j’ai dit : « Non, c’est pas possible ! » Parce que l’Église de là-bas est tellement riche que j’en avais mal au cœur. Là j’étais vraiment malade ! On vivait dans des palais : même les employés vivent dans des petites cages sans fenêtre. On enseigne à 10 % de l’élite. Et puis enfin, toute l’histoire… C’était pas possible. C’était pas possible de vivre là. S’il y a des missionnaires haïtiens, enfin je m’excuse, mais c’est ce que nous autres, nous avons vu. On a été là un mois, et puis moi je me serais sentie au plan de la foi, au plan moral, en état de péché grave. Ça ne veut pas dire tous. Mais on a fait tous les grands centres et puis la façon dont on vit, ça ressemble pas tout à fait à ce que moi, ma foi me dit d’être avec les pauvres.

On est tout simplement revenues au Canada. Le rapport est encore à Rome, à l’étude ! Les conditions étaient un petit peu dures. On a vécu, on a vu quelques endroits retirés dans la jungle, qui sont pas nombreux, où les gens vivent ce que moi j’appelle la vie de missionnaire : être avec ceux qui ont faim. Ce n’est pas des millions dont ces gens ont besoins : c’est d’être aimés, d’être accompagnés. Je ne me souviens pas lequel disait qu’il n’avait pas besoin de Rome. Ça c’est à 100 % vrai, parce que l’argent nous nuit plus qu’autre chose. Et puis, éduquer l’élite pour la sortir du pays, tu détruis le pays à fond. Alors pour les missionnaires (là je vais me faire flamber, c’est certain), envoyez pas d’argent. Moi je suis radicalement contre. Si vous m’en envoyez, si un jour je pars, je vous le renverrai.

Et puis, pour soutenir l’histoire d’Haïti, deux semaines après notre retour, on a vu sur le journal Le Devoir 12 000 Haïtiens qui avaient été vendus à $11.00 pour la récolte de la canne à sucre en République dominicaine. Alors j’ai ajouté ça à mon rapport.

La mission au Québec

Ici, au Québec (c’est là que je commence et mon temps est fini), les deux classes privilégiées pour moi : il y a les riches, les trop riches, qui sont privilégiés; en même temps, moi je dis ce sont des gens qui ont bien besoin de libération, ils ont besoin de missionnaires et puis ça presse, mais moi j’irai pas. Et il y a les pauvres que je situe en deux catégories : les pauvres qui ont besoin de techniques, je dirais ceux qui sont accompagnés par les travailleurs sociaux; ceux-là ont vraiment besoin d’être accompagnés, ils ont besoin de techniques et de support. Mais moi, là où je voudrais aller, c’est la classe en-dessous, en dessous de ceux-là; ceux qui ont été tellement brisés par la société, la société-État mais aussi la société religieuse, l’Église. Il y a beaucoup de gens qui ont brisés par la société-Église. Ces gens-là ont besoin d’être accompagnés. Accompagnés pas pour parler Dieu. Accompagnés au point de vue humain, pour qu’ils puissent apprendre à aimer. Et ici j’aurais beaucoup de témoignages à donner.

Depuis deux ans que je travaille, j’ai rencontré énormément de besoins. J’énumère tout simplement. Dans un quartier de Montréal, Lachine,  j’ai été demandée au mois de juin. En l’espace de trois mois, il y avait trente-six jeunes filles qui demandaient refuge (trente-six en trois mois, ça fait une bonne moyenne !), pour cas d’inceste. Elles ne pouvaient pas vivre chez elles. Ça c’est un petit coin. Il y a eu aussi énormément de cas de femmes battues. Il y en a qui disent : « Elles aiment ça ». Peut-être que si on avait vécu les mêmes choses, on ferait exactement de même… Moi je dis toujours : « Tue-le ». À chaque fois… On n’a plus la peine de mort heureusement ! Mais comme ça il y a des petites femmes que personne n’a touché depuis trois ou quatre mois. Puis elles se reprennent en main, commencent à vivre. Les enfants vivent. J’ai vu des enfants qui étaient à l’école dans une classe spéciale, ici à Montréal, parce qu’ils vivaient ces problèmes : le père, la mère à la maison, la femme était battue, sa mère l’était, sa grand-mère l’était, puis son père battait sa mère aussi. Alors, je ne sais pas ce qu’on ferait dans des situations comme ça. Ces gens-là sont allés voir le curé et le curé leur a donné $25.00 puis il leur a dit que le cas était réglé. Il leur a fait une petite commande d’épicerie. Une petite commande, ça soulage la conscience et puis après… Je pense que, pour moi, il y aurait aussi un grand besoin, s’il y en a qui se sentent assez courageux, pour aller missionner auprès des gens d’Église. Il y aurait aussi peut-être du travail à faire. Je ne sais pas moi, les petits curés, de place en place, est-ce qu’on ne pourrait pas leur en glisser un mot?

Et si on peut maintenant parler de foi (parce que Ginette me signe d’arrêter de parler, mais j’arrêterai pas !) : pour moi, au fond, c’est vraiment vivre, vivre à fond les qualités d’homme. Aimer assez, pas pour donner, mais pour se donner à ceux qui ont des difficultés à accepter. Parce qu’au début, ils ne sont même pas capables de recevoir. C’est frustrant ça ! Ou est-ce que tu peux puiser cette foi-là? Je pense que tu peux la puiser dans les Écritures, pas en l’air, dans les Écritures puis dans la prière, mais la prière vécue avec les gens aussi. Parce que moi, mes plus belles prières c’est celles que je fais avec ceux qui ne peuvent pas prier, parce que je ne dis rien moi non plus à ces moments-là. Être avec eux autres, peut-être sans rien dire, parce qu’il y a un niveau ici à Montréal où c’est très vrai. Et puis, il y a des cas très spécifiques qui me viennent à l’esprit où ces gens-là ont été tellement brisés qu’ils ne peuvent plus marcher, ils rampent. Puis, souvent, c’est pas même sur le plancher, c’est en-dessous du tapis. Pour pas être vus. Et puis ça c’est vraiment pas une farce. J’ai pas vu ramper comme ça en mission. Là-dessus, il y aurait beaucoup d’autres points : je me suis engueulée hier (ça m’arrive des fois) sur la légalisation de la prostitution. Il y aurait peut-être une campagne à faire pour que ce soit légalisé. Je ne sais pas… Alors, je vous laisse là-dessus…

§

Jeanne-d’Arc Turcotte, Franciscaine missionnaire de l’Immaculée-Conception.

Source ; TURCOTTE, Jeanne-d’Arc, fmic, « Une Amérindienne entre la Papouasie et le Québec », Dossier du Congrès – Foi et sociétés – 1980, Montréal, 1980, p. 59-64.

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