138 Chapitre 64 : LA MISE AU TOMBEAU
LA MISE AU TOMBEAU
Les hommes placèrent le corps sur une civière de cuir qu’ils recouvrirent d’une couverture brune et à laquelle ils adaptèrent deux longs bâtons. Cela me rappela l’arche d’alliance. Nicodème et Joseph portaient sur leurs épaules les brancards antérieurs ; Abénadar et Jean, ceux de derrière. Ensuite venaient la sainte Vierge, Marie d’Héli, sa soeur aînée, Madeleine et Marie de Cléophas, puis les femmes qui s’étaient tenues assises à quelque distance, Véronique, Jeanne Chusa, Marie mère de Marc, Salomé, femme de Zébédée Marie Salomé, Salomé de Jérusalem, Suzanne et Anne, nièces de saint Joseph. Cassius et les soldats fermaient la marche. Les autres femmes, telles que Maroni de Naïm. Dina la Samaritaine et Mara la Suphanite étaient à Béthanie, auprès de Marthe et de Lazare. Deux soldats, avec des flambeaux, marchaient en avant ; car il fallait éclairer l’intérieur de la grotte du sépulcre. Ils marchèrent ainsi prés de sept minutes, se dirigeant à travers la vallée vers le jardin de Joseph d’Arimathie et chantant des psaumes sur un air doux et mélancolique. Je vis sur une hauteur, de l’autre côté, Jacques le Majeur, frère de Jean, qui les regardait passer, et qui retourna annoncer ce qu’il avait vu aux autres disciples cachés dans les cavernes.
Le jardin est de forme irrégulière. Le rocher où le sépulcre est taillé est couvert de gazon et entouré d’une haie vive ; il y a encore devant l’entrée une barrière de perches transversales attachées à des pieux au moyen de chevilles de fer. Quelques palmiers s’élèvent devant l’entrée du jardin et devant celle du tombeau, qui est située dans l’angle à droite. La plupart des autres plantations consistent en buissons, en fleurs et en arbustes aromatiques. Le cortège s’arrêta à l’entrée du jardin ; on l’ouvrit en enlevant quelques pieux qui servirent ensuite de leviers pour rouler dans le caveau la pierre destinée à fermer le tombeau. Quand on fut devant le rocher, on ouvrit la civière, et on enleva le saint corps sur une longue planche, sous laquelle un drap était étendu transversalement. Nicodème et Joseph portaient les deux bouts de la planche, Jean et Abénadar ceux du drap. La grotte, qui était nouvellement creusée, avait été récemment nettoyée par les serviteurs de Nicodème qui y avaient brûlé des parfums ; l’intérieur en était propre et élégant ; il y avait même un ornement sculpte au haut des parois. La couche destinée à recevoir le corps était un peu plus large du côté de la tête que du côté opposé ; on y avait tracé en creux la forme d’un cadavre enveloppé de ses linceuls en laissant une petite élévation à la tête et aux pieds. Les saintes femmes s’assirent vis-à-vis l’entrée du caveau. Les quatre hommes y portèrent le corps du Seigneur, remplirent encore d’aromates une partie de la couche creusée pour le recevoir, et y étendirent un drap qui dépassait des deux côtés la couche sépulcrale, et sur lequel ils placèrent le corps. Ils lui témoignèrent encore leur amour par leurs larmes et leurs embrassements. et sortirent du caveau. Alors la sainte Vierge y entra ; elle s’assit du coté de la tète, et se pencha en pleurant sur le corps de son fils. Quand elle quitta la grotte, Madeleine s’y précipita ; elle avait cueilli dans le jardin des fleurs et des branches qu’elle jeta sur Jésus ; elle joignit les mains et embrassa en sanglotant les pieds de Jésus ; mais les hommes l’ayant avertie qu’ils voulaient fermer le tombeau. elle revint auprès des femmes. Ils relevèrent au-dessus du saint corps les bords du drap où il reposait, placèrent sur le tout la couverture de couleur brune, et fermèrent les battants de la porte, qui était d’un métal brunâtre, vraisemblablement en cuivre ou en bronze ; il y avait devant deux bâtons, l’un vertical, l’autre horizontal ce qui faisait l’effet d’une croix (1).
La grosse pierre destinée à fermer le tombeau, qui se trouvait encore devant l’entrée du caveau, avait à peu près la forme d’un coffre (2) ou d’une pierre tombale ; elle était assez grande pour qu’un homme pût s’y étendre dans toute sa longueur ; elle était très pesante, et ce ne fut qu’avec les pieux enlevés à l’entrée du jardin que les hommes purent la rouler devant la porte du tombeau. La première entrée du caveau était fermée avec une porte faite de branches entrelacées. Tout ce qui fut fait dans l’intérieur de la grotte se fit à la lueur des flambeaux, parce que la lumière du jour n’y pénétrait pas. Pendant la mise au tombeau, je vis, dans le voisinage du jardin et du Calvaire errer plusieurs hommes à l’air triste et craintif. Je crois que c’étaient des disciples qui, sur le récit d’Abénadar, étaient venus des cavernes par la vallée et qui y retournèrent ensuite.
(1) La coeur n’explique pas si ces bâtons étaient des pièces détachées, placées devant la porte, ou si c’étaient des bandes en relief faisant partie de cette porte.
(2) Vraisemblablement la soeur Emmerich voulait parler ici de ces caisses antiques où les paysans de son pays renferment leurs vêtements, le fond en est moins large que le couvercle, ce qui leur donne en effet une certaine ressemblance avec une tombe. Elle avait prés d’elle une de ces caisses qu’elle appelait son coffre. C’est en ces termes qu’elle a souvent décrit la pierre en question, dont la forme toutefois n’est pas représentée très clairement.