32 Chapitre 9 : La Résurrection
Le récit proprement dit de la mort et de la Résurrection de Jésus est très proche de celui des évangélistes:
-Le tremblement de terre au moment de la Résurrection,
-l’inquiétude des saintes femmes concernant la difficulté qu’elles auraient pour ôter la pierre,
-la frayeur des gardes,
-l’apparition de l’ange aux saintes femmes et l’annonce de la Résurrection de Jésus,
-le récit des femmes aux apôtres sur ce qu’elles ont vu, ce qu’on leur a dit, et le scepticisme des apôtres,
-la visite de Pierre et de Jean au tombeau,
-l’apparition de Jésus à Marie-Madeleine,
-la première apparition aux apôtres et les pèlerins d’Emmaüs.
Le récit de ces épisodes n’apporte rien de nouveau par rapport à ce que racontent les Évangiles (1478 à 1482). Par contre, en ce qui concerne la Résurrection, Marie d’Agreda relate des faits plus intimes et plus spirituels. Ainsi, on peut lire:
« A l’instant où l’âme très sainte du Seigneur se réunit à son corps, elle lui donna la vie et la gloire immortelle. En quittant le linceul et les parfums avec lesquels Il avait été enseveli, Il fut revêtu des quatre dons de gloire: la clarté, l’impassibilité, l’agilité et la subtilité. » Ces dons avaient en effet été suspendus pendant la vie terrestre de Jésus, période durant laquelle son corps devait rester passible pour nous mériter notre salut, et ne lui furent rendus qu’après la Résurrection. La clarté c’est le don qui fait resplendir les corps glorieux. Par l’impassibilité, le corps de Jésus devint inaltérable, donc incapable de souffrir, par la subtilité Il pouvait pénétrer les autres corps sans rencontrer aucune résistance. Enfin, l’agilité l’affranchissait du poids de la matière et Lui permettait de se transporter d’un lieu à un autre quasi instantanément. Par ailleurs, les plaies de Jésus rayonnaient de lumière. (1467 et 1468)
Marie d’Agreda dit encore: « Au moment même où l’âme très sainte de Jésus-Christ entra dans son corps, celui de sa très pure Mère reçut la joie qui était suspendue dans son âme jusqu’à la Résurrection de cet adorable Seigneur… Marie passa incontinent de la désolation où elle était à une céleste consolation, et de la tristesse à une joie ineffable. (1469) Par cette nouvelle joie, elle commença à se disposer à la prochaine apparition de son Fils ressuscité… La bienheureuse Marie étant ainsi préparée, notre Sauveur Jésus-Christ ressuscité et glorieux entra… La très bienheureuse Reine se prosterna et adora son très saint Fils, et le Seigneur la releva Lui-même… Marie eut de très doux entretiens avec son adorable Fils sur les sublimes mystères de la Passion et de sa gloire. » (1471 et 1472)
Quelques apparitions du Seigneur
Après avoir rencontré sa Mère, le Seigneur se mit en devoir de rassembler les brebis de son troupeau qui avait été dispersé. Le Seigneur commença par les femmes « qui s’étaient montrées les plus fortes en la foi et en l’espérance de sa Résurrection… » (1477) C’est alors que Marie d’Agreda décrit la sortie des femmes pour aller du Cénacle jusqu’au sépulcre, le tremblement de terre, la frayeur des gardes « qui demeurèrent comme morts… Les Marie sentirent aussi quelque crainte, mais elles s’encouragèrent, et le Seigneur les fortifia; elles s’approchèrent donc et entrèrent dans le sépulcre. Elles virent près de l’ouverture l’ange qui avait renversé la pierre et qui était assis dessus… Bientôt elles virent deux autres anges qui leur dirent: Pourquoi cherchez-vous parmi les morts Celui qui est vivant… Dites aux disciples qu’ils aillent en Galilée où ils le verront… (1479) S’étant assurées de sa Résurrection, elles partirent du sépulcre pour en donner la nouvelle aux onze apôtres et aux autres disciples qui avaient suivi le Seigneur; mais la plupart prirent ce qu’elles leur disaient pour un vain rêve tant ils étaient ébranlés dans leur foi, tant ils avaient déjà oublié les paroles de leur Rédempteur. (1480)
Quoique le rapport des Marie parût du délire aux disciples et aux apôtres, Pierre et Jean, souhaitant s’en éclaircirent, se rendirent promptement au sépulcre, et les Marie y retournèrent. Jean arriva le premier… etc. (suite comme dans les Évangiles. 1481 et 1482) Marie d’Agreda ajoute: « Ce fut après que les Maries eurent vu le Seigneur que Jésus apparut à Pierre d’une manière plus secrète et en particulier comme au chef de l’Église, avant de se montrer aux apôtres réunis ou à chacun d’eux, le jour même de sa Résurrection…
Ensuite Il apparut aux deux disciples qui allaient en un bourg nommé Emmaüs… L’un des deux s’appelait Cléophas, et l’autre était Saint Luc lui-même… Chemin faisant ils s’entretenaient de tout ce qui s’était passé… Ils s’étonnaient que le Tout-Puissant eût permis qu’un homme si saint et si innocent subît tant de mauvais traitements. L’un disait: « A-t-on jamais vu une pareille douceur? » L’autre répliquait: « Est-il possible de trouver une patience égale à la sienne, Il a toujours souffert sans se plaindre et sans perdre la majesté et la sérénité de son visage. Sa doctrine était sainte, sa vie irréprochable; dans ses discours Il ne s’occupait que du salut éternel, et dans ses oeuvres que du bien de tous; or quelle raison ont eue les prêtres de lui vouer une haine si implacable? »… mais Il a dit qu’Il ressusciterait le troisième jour qui suivrait sa mort; c’est aujourd’hui, et nous ne voyons pas le fait s’accomplir. « L’autre répliqua: « Il a dit aussi qu’on le crucifierait, et cela est arrivé comme Il l’a prédit. » (1483) Suit la scène rapportée dans l’Évangile de Luc.
Jésus les enseigne:
« … commençant par la figure de l’agneau que Moïse ordonna d’immoler et de manger après avoir teint de son sang le haut des portes, Il leur expliqua le sens symbolique de la mort du grand prêtre Aaron, de la mort de Samson causée par l’excès de passion pour son épouse Dalila, et de plusieurs endroits des psaumes de David où il prédisait l’assemblée que les juifs tinrent pour condamner le Seigneur, sa mort, le partage qu’ils firent entre eux de ses habits, et que son corps ne serait point sujet à la corruption. Il leur expliqua aussi ce qui est dit au livre de la Sagesse, et ce qu’Isaïe et Jérémie ont exprimé encore plus clairement de sa Passion, à savoir qu’Il serait défiguré comme un lépreux, qu’Il paraîtrait un homme de douleurs, qu’on Le mènerait à la mort comme une brebis qu’on va égorger, et qu’Il n’ouvrirait seulement pas la bouche pour se plaindre. Puis Il passa à ce que dit Zacharie, qui L’avait vu couvert de toutes sortes de plaies, et interpréta divers autres endroits des prophètes qui s’appliquent d’une manière évidente aux mystères de sa vie et de sa mort… » (1484 et 1485) Enfin les disciples reconnurent Jésus qui, après la fraction du pain, disparut.
Suit l’épisode de l’apparition de Jésus aux apôtres, et l’incrédulité de Thomas. Pour affermir la foi de ses apôtres, Jésus mangea devant eux un morceau de poisson rôti et un rayon de miel et leur rendit ce qui restait. Puis Jésus leur ouvrit l’intelligence… Voici enfin la scène avec Thomas, l’incrédule contraint de toucher les plaies du Seigneur. (1488) Il est intéressant de voir l’attitude des apôtres envers Thomas avant que Jésus ne lui apparaisse, et de constater l’influence apaisante et déjà importante de la Sainte Vierge:
« … Après la première apparition quelques apôtres lui parlèrent de l’obstination de Thomas, disant qu’il ne voulait point les croire, quoiqu’ils assurassent avoir vu leur Maître ressuscité; et comme il persévéra durant ces huit jours dans son incrédulité, l’indignation de ces apôtres contre lui ne fit qu’augmenter. Souvent ils allaient trouver la bienheureuse Vierge et accusaient Thomas d’un sot entêtement à peine digne de l’homme le plus grossier. Notre indulgente Princesse les écoutait sans émotion… et elle interpella les plus mécontents, les apaisa en leur rappelant que les jugements du Seigneur étaient fort cachés, qu’Il tournerait à sa gloire l’incrédulité de Thomas, qu’Il en tirerait de grands biens pour les autres, et qu’il fallait qu’ils en attendissent les effets avec patience et sans se troubler. » (1489)
Marie d’Agreda rapporte ensuite, et très longuement la scène sur le bord du lac de Tibériade: la pêche miraculeuse, Jean qui reconnaît le Seigneur, Pierre qui se jette à l’eau, Jésus qui avait préparé le déjeuner de ses apôtres, la triple profession de foi exigée de Pierre, etc. (1490 à 1492)
Instructions données par Marie sur les apparitions
On se pose souvent la question: « Pourquoi mon divin Fils apparut-Il une fois en pèlerin, et une autre fois en jardinier, et pourquoi Il ne se faisait pas toujours reconnaître aussitôt qu’Il se manifestait? Sachez ma chère fille, qu’encore que les Marie et les apôtres fussent disciples du Seigneur, et comparativement beaucoup plus parfaits que tous les autres hommes du monde, ils n’étaient pourtant que des enfants en sainteté,… Ils chancelaient souvent dans leur foi… et quoiqu’ils fussent dans l’amitié du Seigneur, ils n’étaient pas assez bien disposés, à cause de leurs infidélités et de leur tiédeur, pour sentir aussitôt les effets célestes de la présence de leur divin maître. Avant de se faire connaître à eux, Il les disposait à recevoir ses lumières et ses faveurs. Quand une fois Il avait renouvelé leur foi et leur amour, Il se faisait connaître, Il leur communiquait l’abondance de sa divinité, qu’ils sentaient, et les comblait des dons les plus admirables au moyen desquels ils s’élevaient au-dessus d’eux-mêmes. Et lorsqu’ils commençaient à jouir des délices de sa présence, Il disparaissait, afin de leur faire désirer et solliciter avec une nouvelle ardeur ses communications et ses doux entretiens.
Voilà ma fille, les raisons pour lesquelles le Seigneur ne se fit point connaître d’abord qu’Il apparut à la Madeleine, aux apôtres et aux disciples qui allaient à Emmaüs. Et Il agit à peu près de même envers beaucoup d’âmes qu’Il choisit pour leur offrir le commerce le plus intime… (1493)
Vous trouverez aussi une instruction salutaire dans des réflexions sérieuses sur la promptitude avec laquelle le Très-Haut se plaît, par sa charité infinie, à répondre à ceux qui sont humbles et dont le coeur est affligé, et à soulager ceux qui Le cherchent avec amour, qui méditent sur ses mystères et qui s’entretiennent de sa Passion et de sa mort… » Et Marie cite en exemple la Madeleine, Pierre et les autres Maries: « … la Madeleine à cause de la ferveur avec laquelle elle cherchait son Maître, sans s’arrêter même avec les anges, et sans s’éloigner du sépulcre, les autres Marie qui montrèrent le même zèle, et par là, méritèrent d’être les premières à voir le Sauveur ressuscité; quant à Pierre, son humilité et la douleur avec laquelle il pleura son reniement, portèrent le Seigneur à le consoler… Peu de temps après Il le visita, le confirma dans la foi et le remplit de joie. Enfin, Jésus apparut aux deux disciples malgré leur doutes, avant de se manifester aux autres, parce qu’ils s’entretenaient avec compassion, de sa mort et de ses souffrances. » (1494)
Et la Vierge Marie conclut:
« Louez le Seigneur de sa bonté infinie, et de ce que, par elle, Il tire de grands biens des maux qui arrivent, comme Il le fit de l’incrédulité des apôtres, dont Il se servit pour découvrir à leur égard l’attribut de sa miséricorde, pour établir d’une manière plus incontestable le mystère de sa Résurrection, et pour donner une preuve éclatante de la rémissibilité des péchés et de sa clémence en pardonnant aux apôtres, et en oubliant en quelque sorte leurs fautes pour les chercher et pour leur apparaître; enfin, en se familiarisant avec eux comme un véritable Père, qui se plaisait à les éclairer et à proportionner ses instructions à leur ignorance et à leur peu de foi. » (1494)