155 Chapitre 28 : L’épître aux Hébreux

L’épître aux Hébreux : les Chrétiens dans la tourmente spirituelle

L’épître aux hébreux n’est pas une lettre (épître), et ne s’adresse pas spécifiquement aux Hébreux. Mais cela n’est pas très important car elle reste un texte très beau, majeur et unique dans tout le Nouveau Testament.

Effectivement, il n’y a pas d’adresse ou salutation au début du texte, et il s’agit plutôt d’un sermon mis par écrit qu’un texte de style épistolaire. Quant aux destinataires de l’exhortation, ils ne sont pas précisés dans le texte, et l’intitulé « aux Hébreux » est tardif, ajouté vers le 2ème siècle.

L’auteur n’indique ni leur région d’appartenance, ni leur ethnie. Ce que l’on peut affirmer sans risque de se tromper, c’est qu’ils sont chrétiens, probablement d’origine juive puisqu’ils ont assurément une bonne connaissance de l’Ancien Testament auquel l’auteur de « l’épître aux Hébreux » fait fréquemment référence.

Sens de l’épître aux Hébreux

Nous avons vu que le titre sous lequel est connu « l’épître aux Hébreux » est en réalité mal choisi. Le père Vanhoye, dans le « Cahier Évangile » n° 19, propose le titre de « Sermon sacerdotal », tant il est vrai que ce texte est un sermon et non une lettre, et surtout qu’il est le seul écrit de tout le Nouveau Testament à appliquer à Jésus Christ le titre de prêtre et de grand prêtre. »]C’est même le thème central, ce que l’auteur affirme lui-même : « Or, point capital de notre exposé, c’est bien un tel grand prêtre que nous avons… » (He 8, 1).

1. Le Grand Prêtre

Mais qu’est ce qu’un prêtre et un grand prêtre ? Dans toute religion, en tant qu’institution organisant le lien au sacré, il faut une fonction sacerdotale qui, précisément permet de «relier» le visible à l’invisible, le profane au sacré, l’humain au divin. La religion juive de l’Ancien Testament. n’échappe pas à cette nécessité, et l’organise dès le début :

• Moïse est le grand prophète, mais c’est Aaron, son frère, qui est fondé par Dieu dans la fonction sacerdotale, et ses fils après lui (Exode 28, 1 s. ; 29, 4 s. ; Lévitique 6 )

• Tout au long de l’histoire du Peuple, la fonction sacerdotale s’est renforcée, étant l’apanage des descendants d’Aaron, les lévites, jusqu’à devenir après l’Exil le seul réel pouvoir incarné en la personne du grand prêtre.

• Mais le sommet de la fonction sacerdotale est sans nul doute Melkisédeq : personnage mystérieux évoqué en Gn 14, 17-20, dont on ne connaît ni l’origine ni la destinée, et qui bénit Abram (= Abraham avant que Dieu ne change son nom en Gn 17, 5), et reçoit de lui « la dîme de tout ». Il lui est donc supérieur.

Dans l’Ancien Testament, le prêtre a la responsabilité sociale des rapports avec Dieu : il est le médiateur. Mais pour entrer en rapport avec Dieu, il faut être « saint », c’est-à-dire séparé, ne pas être comme tout le monde. Il faut donc instituer un rituel de purification qui vise à différencier et séparer le prêtre, et a fortiori le grand prêtre, du reste du peuple. D’où l’institution d’une tribu-caste spécifique (Lévites) qui fournira les prêtres, lesquels devront être consacrés (purifiés) par le bain de purification, l’habillement et l’onction. Des sacrifices d’animaux parachèveront cette consécration (Ex 29).

Qu’est ce qu’a à voir la mission de Jésus Christ avec un rituel devenu tellement strict qu’il s’est élevé en fin au lieu de n’être qu’un moyen (au point que, pour être « en règle », il suffisait de se conformer, fut ce extérieurement, au rituel) ? Pour le peuple, cela signifiait obéir aux prêtres et à leur préceptes, et offrir des sacrifices d’animaux pour expier les manquements à la Loi.

2. Rénovation de la fonction

C’est précisément ce que Jésus Christ est venu dénoncer (cf par exemple Mt 9, 10-13 ; 15, 1-20). Certes, cette réaction contre le ritualisme n’est pas franchement nouvelle : d’ailleurs dans les passages indiqués de Matthieu, Jésus Christ cite Osée (6, 6) et Isaïe (29, 13), mais c’est tout le sens du Nouveau Testament de montrer comment la Loi ne doit être qu’un guide, une aide à l’accomplissement de la relation entre Dieu et les hommes (cf Ga 3, 24-25), qui est d’abord et fondamentalement une relation d’amour. Et c’est là qu’intervient cette interprétation novatrice pour l’époque du sacrifice de Jésus Christ.

3. Le Christ Grand Prêtre

L’auteur de l’épître aux Hébreux commence par situer le Christ : Fils de Dieu, «resplendissement de sa gloire [de Dieu], et expression de son être» (1, 3), il est supérieur aux anges (1, 5-14), mais il est aussi profondément frère des hommes (2, 5-18). Ce sont précisément les deux qualités nécessaires pour le sacerdoce : le grand prêtre doit être « accrédité auprès de Dieu » (3, 2) et solidaire des hommes (5, 1-2).
A cause de sa situation particulière, le Christ n’est pas un grand prêtre ordinaire.

Tout d’abord, il n’appartient pas à la tribu de Lévi, mais à celle de Juda, tribu des rois, non des prêtres (7, 14).
Au lieu de sanctifier en séparant, Jésus Christ le fait en accueillant : il ne cesse de choquer son auditoire en accueillant les femmes, les pécheurs, les publicains, les enfants… autant de gens rejetés ou au moins dénigrés par le sacerdoce ancien.

Parler de « sacrifice » à propos de la crucifixion, était d’emblée choquant : aucun élément du rituel n’était « mis en scène » : pas de lieu saint, mort conséquente d’une condamnation et non acte solennel et glorifiant, pas de distinction entre la victime et l’objet du sacrifice. C’est que, nous dit l’auteur, le Christ est prêtre « à la manière de Melkisédeq », ce personnage mystérieux que l’auteur érige en préfigure du Christ.
De ce fait, comme le précisait déjà le psaume (110, 4), il est prêtre « pour l’éternité » (7, 11 et suivants), et ceci rend caduc tous les sacrifices antérieurs, « car c’est par une tente (lieu de la Présence puis du sacrifice) plus grande et plus parfaite qui n’est pas œuvre des mains – c’est à dire qui n’appartient pas à cette création-ci – et par le sang non pas des boucs et des veaux, mais par son propre sang…qu’il a obtenu une libération définitive » (9, 11-12).

4. Le salut par le Christ Grand Prêtre

Ainsi, alors que le grand prêtre de l’ancienne Alliance était seul purifié par sa consécration rituelle, le Christ, par son sacrifice de la Croix (consécration sacerdotale du Christ), sauve en même temps tous ses frères en humanité : « par une offrande unique, en effet, il a mené pour toujours à l’accomplissement ceux qu’il sanctifie » (10, 14).

De ce fait, les chrétiens ont « …pleine assurance d’accéder au sanctuaire …par une voie nouvelle et vivante… » (10, 19-20). Et l’auteur de les inviter « à résister jusqu’au sang dans leur combat contre le péché » (12, 4) et d’accepter docilement la « correction », en fils qu’ils sont du Père: « Quel est en effet le fils que son père ne corrige pas ? » (12, 7).
Et alors s’établira une vraie communauté fondée sur l’amour fraternel (13, 1).

Histoire de la rédaction de l’épître aux Hébreux

 

Qui est l’auteur de l’épître aux Hébreux ? Ce texte a longtemps été attribué à Saint Paul, surtout dans les Églises d’Orient. Aujourd’hui les spécialistes estiment que Paul ne peut pas être l’auteur direct de ce texte. En revanche il est indubitable que l’auteur doit être un disciple de l’apôtre. L’épître aux hébreux a du être composée vers les années 63 – 70 après Jésus-Christ.

Son écrit est saisissant de perfection littéraire, construit selon les plus purs canons de la composition hébraïque.

Introduction : mise en perspective dans l’histoire de la Révélation

1. Situation du Christ : supérieur aux anges, frère des hommes

2. Christ Grand Prêtre : accrédité auprès de Dieu et solidaire des hommes

3. Spécificité du sacerdoce du Christ : à la manière de Melkisédeq

4. Foi des anciens et endurance nécessaire

5. Invitation à l’existence chrétienne

Conclusion et doxologie

 

 

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