« Deutéronome » signifie littéralement « deuxième loi » en référence à la Loi donnée sur la montagne du Sinaï. Le livre du Deutéronome se présente comme une série de longs discours de Moïse juste avant l’entrée en Canaan. Même si ces discours énoncent diverses prescriptions juridiques (reprenant entre autres les dix commandements, ce qui a permis de parler d’une seconde loi par rapport à l’Exode), il ne s’agit pas d’une simple compilation de textes juridiques. Il s’agit plutôt d’une tentative de parler directement au cœur de l’homme, de le convaincre que son bonheur ne se trouve que dans la fidélité à la loi du Seigneur.
Par certains aspects, le Deutéronome apparaît comme le « testament » de Moïse, son encouragement à tenir bon après qu’il ait disparu. Il se termine avec le sobre récit de la mort de Moïse.
Sens du texte du Deutéronome
Le Deutéronome reprend beaucoup d’éléments des livres de l’Exode et des Nombres, avec lesquels il constitue le Pentateuque (les 5 premiers livres du canon juif comprenant aussi Genèse et Lévitique). Le Deutéronome est divisé en plusieurs parties (ou discours de Moïse) :
• dans un premier discours, il retrace les principaux événements du voyage à travers le désert ;
• dans un deuxième, il répète et développe les points de la loi dans lesquels ressort le mieux l’esprit de piété et d’humanité qui doit distinguer le peuple de Dieu ;
• le troisième renferme une injonction finale, adressée à Israël ;
• le livre se termine par l’indication des dernières mesures prises par Moïse en vue de l’entrée en Terre Promise, et par le récit de sa mort.
Ce livre accorde une très grande importance à l’ALLIANCE, mise en relation avec la première Alliance entre Dieu et Moïse, établie sur la montagne du Sinaï, juste après le passage de la mer Rouge.
Le Deutéronome énonce une morale qui ne veut pas s’imposer du dehors mais qui cherche à s’appuyer sur le cœur de l’homme. Les personnages principaux du Deutéronome : Moïse, Josué, les lévites…
Moïse : né en Égypte, sauvé par la fille du Pharaon oppresseur du peuple juif. Moïse doit s’enfuir au désert où Dieu se révèle à lui et l’envoie chez Pharaon pour obtenir la libération de ses frères. Malgré le refus de Pharaon, Dieu libère son peuple et Moïse conduit ses frères dans le désert. Dieu les guide et fait d’eux son peuple en établissant avec eux une Alliance, par l’intermédiaire de Moïse sur la montagne du Sinaï. Le peuple restera 40 ans au désert, et Moïse mourra juste avant d’entrer en terre promise de Canaan, au-delà du fleuve Jourdain.
Les rois et princes de tribus adversaires du peuple et de Moïse : les rois, Amorites notamment (rois= princes régnants sur une ville et son environnement immédiat).
Josué : fils de Nûn, puis renommé par Moïse, il sera considéré dans le Deutéronome comme l’artisan de la conquête de la terre promise de Canaan.
Les lévites : membres de la tribu de Lévi, choisie pour porter l’Arche de l’Alliance, signe de la présence de Dieu au milieu de son peuple. Ils sont au service de Dieu et du peuple (d’où leur appellation de « prêtres lévites » dans le Deutéronome).
Les douze tribus, composant le peuple d’Israël : les destinataires de l’Alliance, invités à choisir la vie et le bonheur (Deutéronome 30), en respectant ces instructions données par Moïse de la part de Dieu. Pour cela, ils s’appuient sur le Shema Israël « écoute, Israël, le Seigneur notre Dieu, est UN, tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de tout ton être, de toute ta force… » (Deutéronome 6 versets 4 à 9).
Le Shema constitue l’une des prescriptions majeures du judaïsme.
Pour aller plus loin dans le Deutéronome
Le Décalogue
Le Décalogue (dix paroles) se comprend d’abord dans le contexte de l’exode qui est le grand événement libérateur du peuple d’Israël.
Ces « dix paroles » indiquent les conditions d’une vie libérée de l’esclavage.
Elles expriment ce qui permet de vivre ensemble.
Elles ont permis la constitution d’un peuple. C’est par l’acceptation de la parole de Dieu que les douze tribus réduites à l’esclavage en Égypte deviennent le peuple d’Israël.
Plus largement, ces dix paroles inspirent le désir de vivre dans des institutions justes et touchent aux fondements de la loi morale : l’amour, le respect de la vie, la vérité, la parenté.
La question ne se limite jamais au seul respect de la Loi, mais à ce qui dans ces « dix paroles » est invitation au dépassement de soi.
Les dix Commandements sont l’expression de lois spirituelles qui, si on y adhère, garantissent la paix, l’harmonie et l’accomplissement pour l’humanité.
Les dix exhortations énoncées ici, concernent l’homme dans sa relation à Dieu (pour les quatre premières) et dans sa relation aux hommes (pour les six suivantes).
Les 10 Paroles du Décalogue :
1) « tu n’adoreras pas d’autres dieux que moi »
2) « tu ne te fabriqueras aucune idole, aucun objet qui représente ce qui est dans le ciel, sur la terre ou dans l’eau sous la terre, tu ne t’inclineras pas devant des statues de ce genre, tu ne les adoreras pas »
3) … « tu ne prononceras pas mon nom de manière abusive… »
4) « prends soin de me consacrer le jour du Sabbat*, comme je te l’ai ordonné…»
5) … « respecte ton père et ta mère, comme je te l’ai ordonné »
6) … « tu ne commettras point de meurtre. »
7) « tu ne commettras pas d’adultère. »
8) « tu ne commettras pas de vol. »
9) « tu ne prononceras pas de faux témoignage contre ton prochain »
10) « tu ne convoiteras rien de ce qui appartient à ton prochain, ni sa femme, ni sa maison, ni son champ, ni son serviteur, ni sa servante, ni son bœuf, ni son âne. »
Commentaires de l’auteur de la note
Terre promise : il s’agit selon la Bible, de la terre promise par Dieu aux Patriarches : Abraham, Isaac et Jacob.
Sabbat : 7° jour de la semaine juive, le samedi, consacré au repos.
Pentateuque : nom donné aux 5 premiers livres (ou rouleaux) du Canon juif, qui forment une certaine unité et sont traversés par la figure de Moïse (que la Tradition juive a longtemps reconnu comme l’écrivain de ces cinq livres).
Géographie et Deutéronome : pour mieux se repérer
Vue du Mont Nebo
Les discours de Moïse au peuple précèdent leur entrée en Canaan (territoire couvert en partie aujourd’hui par le sud Liban, l’ouest de la Jordanie, la Cisjordanie et Israël), entrée inaugurée par la victoire sur la ville de Jéricho au nord de la Mer Morte… Moïse serait mort au mont Nebo à l’est du Jourdain (Transjordanie), face à Jéricho. Personne ne sait où est son tombeau.
Histoire de la rédaction du Deutéronome
1. A l’origine, on trouverait un matériel pré-deutéronomique de lois mises par écrit.
2. Puis on constitue, peut-être sous Ezékias (716-687 av. J.-C.) ou peu après, une collection de lois qui forment les chapitres 12-25, ce qu’on appelle aujourd’hui le Code deutéronomique, avec une introduction au chapitre 12. Ce Code fut peut-être oublié pendant le long règne de Manassé (687-642 av. J.-C.), avant d’être redécouvert sous le règne de Josias (640-609 av. J.-C.).
3. Ce corpus de lois fut interprété, avant l’Exil à Babylone (587 – 538 av. J.-C.), par l’ajout d’un encadrement qui s’intéresse aux relations entre Dieu et Israël. Les auteurs de cet encadrement peuvent également avoir retravaillé le corpus des lois. On devrait à ces auteurs les chapitres 6-10 et 26.
4. Après l’Exil, ce livre de lois va devenir le premier livre d’un ensemble qui raconte l’histoire d’Israël depuis la conquête du pays jusqu’à l’Exil en Babylonie (du Deutéronome au 2ème livre des Rois), ce qu’on appelle dans l’exégèse contemporaine «l’historiographie deutéronomiste». On écrit pour cela une nouvelle introduction en Dt 1,6-4,40 et Dt 27-34.
5. Alors que plusieurs couches rédactionnelles peuvent encore intervenir, on va séparer à l’époque perse le Deutéronome de l’historiographie deutéronomiste pour en faire le cinquième livre de la Tora ou Pentateuque.