Le livre d’Ezéchiel appartient à l’Ancien Testament, dans la section des prophètes. Parmi les seize prophètes nommés en titres de livres, quatre sont dits « grands » : Isaïe, Jérémie, Ezéchiel et Daniel.
Les livres des prophètes appartiennent au temps du déclin d’Israël, à l’exil et au retour en terre natale. Ils couvrent une période d’environ 300 années, et s’adressent d’abord au royaume de Juda (issu de la scission du royaume en deux états, après les rois David et Salomon : Juda au sud avec Jérusalem pour capitale et Israël au nord avec Samarie pour capitale) mais aussi au royaume d’Israël.
Ezéchiel s’adresse plus particulièrement aux juifs exilés à Babylone, après la destruction du Temple, et la déportation d’une partie du peuple, qui s’est déroulée en deux temps : premier exil en –597 où avec les cadres et responsables du pays le jeune Ezéchiel est emmené à Babylone, et une seconde vague d’expulsions à compter de –587, à la destruction de Jérusalem et de son Temple. Ezéchiel, lui-même, sera exilé avec les habitants de Jérusalem et il exercera la plupart de son ministère durant sa captivité.
Ezéchiel se voit comme un « guetteur » qui doit avertir des dangers. L’un de ses thèmes de prédilection est celui de la responsabilité individuelle de chacun devant Dieu. Le peuple ne fait que désobéir à la volonté de Dieu. Pour Ezéchiel, c’est la cause des malheurs qui le frappent, plus particulièrement la deuxième déportation de – 587. Il dénonce ces errements, et à partir de l’histoire du peuple juif, il témoigne des infidélités constantes des Israélites vis à vis de l’Alliance avec Dieu. Dieu seul peut guérir son peuple, et cette restauration s’accompagnera d’un nouveau Temple, de construction divine, source de vie pour tous.
Sens du livre d’Ézéchiel
86 fois dans ce livre, la formule « vous reconnaîtrez que Je suis le Seigneur» revient sous une forme ou une autre. Le peuple croyant ne reconnaît pas Dieu seulement dans le culte, mais aussi dans les évènements historiques qu’il est en train de vivre (l’exil). L’idolâtrie, cause du malheur qui frappe Israël, apparaît comme une rébellion contre Dieu.
Tout au long du livre, cette idolâtrie détournant les hommes de l’Éternel, est présentée sous toutes ses formes, montrant à quel point la rupture d’avec Dieu conduit sur des chemins de mort.
L’injustice sociale est aussi dénoncée, telles que la spoliation des terres, l’oppression des plus faibles, l’usure liée à l’argent prêté, sans oublier la responsabilité forte des classes dirigeantes, les prêtres, les chefs, les prophètes institutionnels, les nantis, et les rois plus particulièrement. Ézéchiel est un prophète qui annonce un jugement de Dieu où Israël devra rendre compte de sa conduite.
Ce malheur apparent de la déportation est un moyen, douloureux évidemment, de parvenir à la reconnaissance du Seigneur comme le Dieu souverain. La gloire de Dieu n’est pas attachée à un pays, ni même au Temple, puisqu’elle peut se manifester en pays étranger. La vie du peuple déporté est liée à cette présence de Dieu et c’est une étape précédant le rétablissement définitif d’Israël sur sa terre. L’Alliance de Dieu avec son peuple n’est pas un contrat mais une alliance de paix, source de Vie. Le salut est vu comme un renouvellement total de l’individu au sein du peuple régénéré.
Les anciens soutiens de la foi, le Temple, la Terre promise, la royauté de David, seront rétablis mais par la pure Grâce de Dieu. Le véritable roi est le Seigneur, garant de l’unité retrouvée, préservant les droits de chacun, de chaque tribu, de tout le peuple.
Les personnages principaux du livre d’Ézéchiel
Ézéchiel, les rois de Juda, Nabuchodonosor, Gog et Magog. Ézéchiel est un homme extraordinaire, visionnaire et imaginatif, habitué à comprendre et combiner rituel et symbole. Passionné de Dieu, il lui obéit totalement.
Peu d’indications précises sur sa vie ! Il parle de son épouse comme de « la prunelle de ses yeux ». Celle-ci meurt avant la deuxième vague de déportation.
Consulté par les « anciens », il annonce la ruine prochaine de Jérusalem (ce qui sera effectif en – 587), dénonce l’idolâtrie qui menace le peuple, condamne les faux prophètes et les fausses doctrines…
« Fils d’homme » (en hébreu « ben ’adam ») : Ézéchiel est ainsi nommé à travers tout le livre ! Cela signifie simplement « homme, être humain ». C’est le terme dont Jésus-Christ s’est le plus souvent servi pour se décrire (Nouveau Testament). Cette expression n’a pas ici le sens messianique du « Fils d’homme » (en araméen « bar ’enash ») de Dn 7,13.
Les rois de Juda : Yoyakin et Sédécias, rois de Juda, victimes l’un de la 1ère et l’autre de la 2ème déportation.
Leur vainqueur : Nabuchodonosor, roi de Babylone (- 604, – 562), auteur des déportations de Jérusalem ( – 597, – 587 la plus conséquente, et -582).
La géographie et le livre d’Ézéchiel
Pour mieux situer le texte… »]Les deux déportations juives en Mésopotamie du sud par le roi de Babylone Nabuchodonosor ont concerné le roi de Juda, sa cour, les notables, les militaires en –597, puis le nouveau roi de Juda (qui s’était révolté) et une petite partie de la population en – 587.
Les déportés se retrouvent dans la région de Nippur en Mésopotamie du sud, à environ 160 km de la Bagdad actuelle, plus précisément au bord d’un canal nommé Kébar. C’est au bord de ce canal Kébar que le prophète Ézéchiel a sa première vision (chapitre 1) et qu’est mentionnée une colonie d’exilés de Judée (chapitre 3).
Histoire de la rédaction du livre d’Ézéchiel
Le livre est écrit entièrement à la 1ère personne, avec une richesse d’images et un style où l’imagination débordante peut déconcerter lors d’une première approche. Fils de prêtre et prêtre lui-même, Ézéchiel est fortement marqué par la déportation dont il est lui aussi victime. Cet événement provoquera chez lui des troubles forts : mutisme, hébétude, prostration, ou exubérance soudaine.
Paradoxale, capable du sublime comme du vulgaire, impétueuse comme soudainement emprunt de minutie pointilleuse, on peut parfois se demander s’il s’agit bien toujours de l’œuvre d’un même auteur ! Si l’on accepte l’option d’un même écrivain, Ézéchiel apparait alors comme un homme prodigieusement doué.
Un certain nombre de visions d’Ezéchiel peuvent être datées : les péchés de Jérusalem en – , l’oracle de la marmite en – 589, par exemple…
Il existe des parallèles entre le livre d’Ezéchiel et la littérature P, ce qui suggère que sa rédaction finale ne peut pas remonter avant le début de l’époque perse. Plusieurs passages semblent refléter les préoccupations des exilés revenus en Juda après l’exil. On trouverait ainsi une rédaction pro-Gola du début de l’époque perse (la Gola correspond à la communauté judéenne exilée en Babylonie), composée des descendants de l’aristocratie de Jérusalem qui avait été déportée en Babylonie en -597 avec le roi Yoyakin. Cette rédaction, de retour en Juda, retravaillerait un livret d’oracles de jugement attribué à Ézéchiel (Ez 4-24*), d’origine palestinienne, écrit entre -597 et -587. Cette rédaction est opposée aux déportés de -587 (Ez 14,21-23) et aux judéens restés en Juda (Ez 33,23-29).
A l’époque perse ou à l’époque hellénistique, la rédaction pro-Gola aurait été retravaillée par une rédaction pro-Diaspora.
Un certain nombre d’ajouts a par ailleurs enrichi le texte jusqu’au IIème siècle avant JC.