119 Chapitre 17 : Histoire de la rédaction de l’évangile de Jean

Histoire de la rédaction de l’évangile de Jean

La rédaction et la valeur historique de l’évangile de Jean.

1 – La rédaction de l’évangile de Jean

On date habituellement l’évangile de Jean des années 90 à 100. Que s’est-il passé entre les années 30 et les années 90 ? Car un Évangile a toujours une histoire, aucun des quatre n’a été écrit en une seule fois, en un seul jour !

Pour ce qui est de l’évangile de Jean, bien des hypothèses ont été émises, mais grosso modo, les analyses littéraires et théologiques font ressortir à peu près les mêmes étapes, la plupart du temps au nombre de quatre :

1ère étape : à la base, une tradition ancienne, dont l’apôtre Jean pourrait être à l’origine, comme l’attestent très rapidement des sources autorisées (comme saint Irénée, au 2ème siècle). Être à la source du quatrième évangile ne veut pas dire forcément l’avoir rédigé.

2ème étape : un groupe de disciples de ce Jean l’apôtre développe cette tradition ancienne qui dès lors s’amplifie. Récits et discours prennent forme et se transmettent encore de façon orale.

3ème étape : manifestement, à un moment donné, un chef de file émerge, qui devient l’auteur de l’évangile (souvent appelé l’évangéliste) à peu près sous la forme que nous connaissons : il rassemble, il élague, il organise.

4ème étape : un peu de temps a passé, la situation de la communauté chrétienne a changé. Le contexte est devenu plus polémique. Des disciples retouchent encore un peu l’évangile en fonction de cette nouvelle situation. En même temps, ils ont le souci de récupérer des éléments qui appartenaient à la tradition orale de la 2ème étape et qui avaient été éliminés par l’auteur de la 3ème étape.

L’histoire de la rédaction de l’évangile de Jean s’étale assurément sur plusieurs décennies, c’est pourquoi on parle d’une « école johannique » : des thèmes, des données, ont été véhiculés au sein d’une communauté de disciples qui se réclamait de l’enseignement de l’apôtre Jean.

La tradition manuscrite de l’évangile de Jean est excellente : le témoignage le plus ancien est un petit morceau de papyrus, grand comme le creux de la main, découvert en Égypte (le Papyrus Rylands 457). Publié en 1935, il contient, recto verso, les versets 31-33 et 37-38 du chapitre 18. Il est daté par les papyrologues entre 100 et 150. Cela confirme l’opinion traditionnelle selon laquelle la rédaction finale de l’évangile de Jean n’a pas pu dépasser le début du 2ème siècle.

 

2 – La valeur historique de l’évangile de Jean

L’évangile de Jean, malgré sa rédaction tardive et son genre discursif, s’avère une source fondamentale pour la connaissance de Jésus :

– C’est par cet Évangile par exemple que l’on sait que Jésus lui-même, à un moment donné, a baptisé et que les tout premiers disciples viennent de l’entourage de Jean Baptiste.

– S’il n’y avait pas l’évangile de Jean, on pourrait penser que le ministère de Jésus a duré six mois. Mais Jean parle de trois fêtes de la Pâque ; le temps est balisé. Et on comprend mieux alors le conflit progressif entre le prédicateur galiléen et les chefs juifs, puisque, d’après son récit, il y a eu plusieurs montées à Jérusalem.

Témoin de la lutte qui s’est engagée entre la communauté chrétienne et le monde juif, l’évangile de Jean est aussi une source fondamentale pour la connaissance du judaïsme du 1er siècle :

– On y apprend, et cela est confirmé par d’autres documents, que l’attente d’un prophète (qu’on appelait LE prophète) était un élément important de l’espérance juive (cf. 1,21 : « Es-tu le prophète ? » ; 6,14 : « C’est vraiment lui le prophète qui doit venir dans le monde »).

– Autre exemple, qui concerne une institution : on lit en 18,31 : « Il ne nous est pas permis de mettre quelqu’un à mort ». Effectivement, les sources historiques confirment qu’au 1er siècle, les Juifs n’ont plus le droit d’exécuter les sentences capitales. La décision revient au gouverneur, à Pilate.

Ces exemples montrent le bon ancrage de l’évangile de Jean dans l’histoire.

 

Lieu de la rédaction : la Tradition parle de la région d’Ephèse, mais cela peut être aussi en Syrie, en tout cas en dehors de Palestine que la communauté johannique aurait fuie. L’évangile de Jean explique souvent le sens de termes ou de noms sémitiques ou donne des précisions géographiques, ceci reflète peut-être une situation ou une tradition, transmise d’abord dans un contexte palestinien ou juif, et désormais proclamée dans un autre contexte (diaspora ou pagano-chrétien).

Le texte sur la femme adultère (7,53-8,11) manque dans beaucoup de manuscrits anciens et n’appartient pas à la tradition johannique.

Le manuscrit P52 de la bibliothèque Ryland, daté d’environ 125 est le plus ancien fragment de l’évangile selon saint Jean :

 

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