143 Chapitre 11 : JOSEPH D’ARIMATHIE

Joseph d’Arimathie

Joseph d’Arimathie
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Fonction
Elder (en)
Biographie
Naissance
Arimathea (en)Voir et modifier les données sur Wikidata
Décès
Lieu inconnu (dimanche)Voir et modifier les données sur Wikidata
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Joseph d’Arimathie (ou d’Arimathée selon les traductions), Ἰωσήφ ἀπὸ Ἀριμαθαίας en grec ancien, est un personnage du Nouveau Testament qui est introduit par les auteurs des quatre évangiles, dans la péricope de la mise au tombeau, comme un notable juif, membre du Sanhédrin, qui procède à la descente de croix et à l’inhumation de Jésus. L’historicité de Joseph d’Arimathie reste largement inaccessible, le personnage ayant peut-être été introduit dans les récits canoniques dans une visée apologétique pour les chrétiens afin de justifier la découverte du tombeau vide1,2 et « réfuter les insinuations de leurs adversaires au sujet d’une mort apparente de Jésus qui aurait rendu l’idée de la résurrection absurde3 ».

Selon des légendes médiévales, il aurait recueilli le Sang du Christ dans un vase, le Saint Calice, ou le Saint Graal dans le cycle arthurien, et aurait participé à l’évangélisation de la Grande-Bretagne avec l’apôtre Philippe.

Présent dans les évangiles apocryphes, il est considéré comme saint chrétien dans les calendriers4 : il est fêté dans le Martyrologe romain occidental le 31 août5 et le 31 juillet en Orient. Sa renommée gagnera en ampleur sous l’influence des romans du Graal et de la politique de propagande de l’abbaye de Glastonbury.

L’origine du nom Arimathie

L’origine du nom Arimathie (en) reste encore débattue, faisant plus l’objet de vœux pieux et de conjectures qui ne s’appuient sur aucune source documentaire ou archéologique6.

Le terme employé dans le texte grec ancien de Matthieu est Ἀριμαθαία, ArimathaiaArimathie est peut-être le lieu dont il est question dans le premier livre de Samuel (1 : 1), en hébreu הרמתים, Ha-Ramathaïm. Une conjecture identifie Ha-Ramathaïm à l’actuel village de Rantis, au nord-ouest de Jérusalem3. La racine hébraïque רם (RM) signifie hauteurendroit élevé, et se retrouve dans le nom de plusieurs localités. Ha-Ramathaïm veut donc dire, littéralement, les hauteurs7.

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Descente de croix 

Historicité du personnage

Les évangiles canoniques se livrent à une christianisation progressive du personnage8 : l’Évangile selon Marc présente Joseph d’Arimathie comme membre respecté9 du Sanhédrin, mandaté pour réclamer le cadavre de Jésus et l’inhumer hâtivement avant que ne débute le sabbat pascal, puis relate la mise dans un tombeau quelconque par cet éminent Juif ; la construction littéraire de la péricope dans l’Évangile selon Luc le présente comme un membre du conseil « bon et juste » (sympathisant du christianisme, ce portrait moral l’exonère de la responsabilité du Sanhédrin qui a consenti à sa condamnation) plaçant Jésus dans un tombeau neuf10, l’évangéliste excluant que le corps de Jésus ait connu le sort réservé aux criminels11, la fosse commune (caveau des réprouvés12, sorte d’ossuaire commun pour les corps des condamnés non réclamés)13 ; l’Évangile selon Matthieu relate l’inhumation par un disciple du Christ (ouvertement converti à son enseignement14) dans son propre caveau familial ; enfin l’Évangile selon Jean, en combinant plusieurs strates de tradition dont les incohérences (double mandat auprès de Pilate, double embaumement) sont difficiles à lever15, forge la légende16 d’un disciple converti qui procède à une sépulture royale satisfaisant à tous les usages.

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Caveau familial typique des sépultures de familles juives aisées au temps du Second Temple (Tombe de Nicanor)17.

L’amplification théologique autour de ce récit est issue de développements christologiques ultérieurs et rend ainsi l’historicité de Joseph d’Arimathie inaccessible18Rudolf Bultmann « démythologise » l’épisode évangélique de la descente de croix par Joseph d’Arimathie et Nicodème, et le range parmi les théologoumènes, c’est-à-dire des affirmations théologiques présentées dans les récits bibliques comme des faits historiques19. Des doutes sur l’implication de Joseph d’Arimathie sont également soulevés par l’historien des religions Charles Guignebert, élève d’Ernest Renan, qui pense que le corps de Jésus, comme tout supplicié, a été jeté dans la fosse commune20 tandis que John Dominic Crossan considère que l’histoire de Joseph d’Arimathie qui offre son propre sépulcre pour l’inhumation de Jésus est une invention des évangélistes21. Guillaume Baldensperger tente de résoudre cette contradiction en distinguant une double sépulture (inhumation hâtive faite par les Juifs puis inhumation effectuée par Joseph d’Arimathie dans un sépulcre honorable)22Maurice Goguel voit dans l’harmonisation ultérieure des textes canoniques par les Pères de l’Église une tentative de réconcilier des traditions différentes et le signe de la transformation par les évangélistes d’une tradition primitive relatant le désarroi des disciples du Christ qui ne pouvaient accepter une sépulture définitive dans une fosse commune, d’où leur invention d’un argument apologétique relativement tardif dans une perspective messianique23 : Joseph d’Arimathie, notable ayant une certaine estime pour Jésus qu’il considère peut-être comme un prophète d’Israël victime de l’oppression romaine, récupère le corps pour lui donner une sépulture décente24.

Joseph d’Arimathie apparaît dans les évangiles pour la première fois après la crucifixion probablement pour justifier la demande à Ponce Pilate de l’autorisation d’emporter le corps de Jésus par un membre disposant d’entrées auprès des autorités romaines puis la mise au tombeau dans son propre sépulcre, ce notable n’ayant aucun autre rôle dans les évangiles. L’intention théologique25 des évangélistes lorsqu’ils introduisent le récit de la mise au tombeau est double : Joseph d’Arimathie représente la figure du père, Joseph de Nazareth, présent à la naissance, mais absent par la suite, et qui apparaît ici pour clôturer dignement la vie de son fils tandis que l’ensevelissement dans ce sépulcre vise probablement par un procédé relevant de l’intertextualité à rappeler la prophétie du Serviteur souffrant dans le Livre d’Isaïe26. La présence de Joseph d’Arimathie au moment de la Passion du Christ pose donc problème aux exégètes actuels27.

Les Évangiles

Évangile selon Marc 15

  • (Rédaction : 65-75.)
  • 42. Le soir étant déjà venu, comme c’était Préparation, c’est-à-dire veille du sabbat,
  • 43. vint Joseph d’Arimathie, membre honoré du grand conseil, qui attendait, lui aussi, le royaume de Dieu. Il alla hardiment auprès de Pilate pour demander le corps de Jésus.
  • 44. Mais Pilate s’étonna qu’il fût déjà mort, fit venir le centurion, et lui demanda s’il y avait longtemps qu’il était mort.
  • 45. Renseigné par le centurion, il accorda le cadavre à Joseph.
  • 46. Ayant acheté un linceul, il le descendit, l’enveloppa dans le linceul, le déposa dans un sépulcre qui avait été taillé dans le roc, et il roula une pierre à l’entrée du sépulcre.
  • 47. Or Marie la Magdaléenne et Marie, mère de José, observaient où il était déposé.

Évangile selon Matthieu 27

  • (Rédaction : années 70-80.)
  • 57. Le soir venu, vint un homme riche d’Arimathie, nommé Joseph, qui lui aussi était devenu disciple de Jésus.
  • 58. Il alla trouver Pilate pour lui demander le corps de Jésus ; Pilate alors ordonna qu’on le lui remît.
  • 59. Joseph prit le corps, l’enveloppa d’un linceul blanc,
  • 60. et le déposa dans son sépulcre neuf, qu’il avait fait tailler dans le roc ; puis, ayant roulé une grosse pierre à l’entrée du sépulcre, il s’en alla.
  • 61. Or Marie la Magdaléenne et l’autre Marie étaient là, assises en face du tombeau.

Évangile selon Luc 23

  • (Rédaction : années 70-80.)
  • 50. Et alors un homme, nommé Joseph, qui était membre du conseil, homme bon et juste,
  • 51. — il n’avait pas donné son assentiment à leur résolution ni à leur acte —, d’Arimathie, qui attendait le royaume de Dieu,
  • 52. cet (homme) alla trouver Pilate pour lui demander le corps de Jésus ;
  • 53. il le descendit, l’enveloppa d’un linceul, et le déposa dans un sépulcre taillé dans le roc, où personne n’avait encore été mis.
  • 54. C’était le jour de Préparation, et le sabbat commençait.
  • 55. Ayant suivi (Joseph), les femmes qui étaient venues de la Galilée avec (Jésus) considérèrent le sépulcre et comment son corps (y) avait été déposé.
  • 56. S’en étant retournées, elles préparèrent des aromates et des parfums ; et, pendant le sabbat, elles demeurèrent en repos, selon le précepte.

Évangile selon Jean 19

  • (Rédaction : années 90-100.)
  • 38. Après cela, Joseph d’Arimathie, qui était disciple de Jésus, mais en secret par crainte des Juifs, demanda à Pilate d’enlever le corps de Jésus, et Pilate le permit. Il vint donc et enleva son corps.
  • 39. Nicodème, qui précédemment était venu vers lui de nuit, vint aussi, apportant un mélange de myrrhe et d’aloès, environ cent livres.
  • 40. Ils prirent donc le corps de Jésus et l’entourèrent de bandelettes avec les aromates, selon la manière d’ensevelir en usage chez les Juifs.
  • 41. Or, au lieu où il avait été crucifié, il y avait un jardin, et dans le jardin un sépulcre neuf, où personne n’avait encore été mis.
  • 42. C’est là, à raison de la Préparation des Juifs, le sépulcre étant proche, qu’ils mirent Jésus.

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PERSONNAGES DE LA BIBLE© par campionpierre. Tous droits réservés.

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