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Non! Ne soyez pas pessimiste

Lander Paris

Tous les ateliers des tailleurs sont aussi importants les uns comme les autres. Je rappelle aux adeptes les plus fervents des ateliers des tailleurs napolitains ou londoniens que dans tous les pays il y a des gentlemen qui soignent leur image et leurs vêtements avec un très grand soin. Il y a aussi de bons tailleurs dans pratiquement la totalité des pays de la vieille Europe. Et celui qui n’est pas d’accord avec cette affirmation, je lui recommande d’approfondir ses connaissances. Dans la majorité des pays du vieux continent les conditions requises et les années d’expérience qui sont exigées pour pouvoir mettre à la porte d’un atelier de tailleur les mots Maître-Tailleur.

C’est quand même curieux d’observer notre pays, la France, le pays qui occupe encore le sommet indétrônable de la haute couture, pourtant chaque jour qui passe, il me semble difficile de rencontrer des gentlemen habillés élégamment pour ne pas dire correctement.

Il ne faut pas oublier que Paris du temps d’avant, se sont établi plusieurs tailleurs internationaux des plus réputés. Henry Poole, Caraceni, Hilditch et l’inégalable Espagnol Joseph Camps en personne. Il ne reste à Paris plus rien, la majorité de ceux qui se sont établis à Paris, sont rentrés chez eux. Simplement, parce que les gentlemen français ne demandaient plus leurs services.  Sans oublier qu’en France les gentlemen étaient particulièrement bien habillés comme en témoigne l’élégance sculpturale d’acteurs comme Noiret, Gabin… C’est la justice de l’élégance et du style. Aujourd’hui, le Royaume-Uni et l’Italie sont les deux pays référencés à l’heure de s’habiller. Le british style dénommé comme la grande histoire, juste devant le napolitain style un peu récent, mais une véritable révolution de style. Avec une confiance totale, je peux vous affirmer que Naples sans Savile Row n’aurait pas atteint les cotes de qualité et de perfection des tailleurs les plus prestigieux.

Si la créativité et la recherche de style sont italiennes, le savoir-faire et la rigueur appartiennent à Saville-row. Si nous avions le malheur de comparer le british style, l’italien style et le neapolitan style. C’est juste d’admettre que si aujourd’hui, il y a une forme de style et d’élégance qui traverse les frontières, c’est la napolitaine. Personne ne devrait cependant, oublier  que le style italien c’est Giorgio Armani (les tailleurs au service de l’industrie). Depuis 45 ans concrètement l’atelier du tailleur napolitain a atteint de tels niveaux de perfection et a su créer ce style si particulier.

Naples aujourd’hui, c’est la référence du maître tailleur et la Mec des gentlemen les plus élégants du monde, ils se présentent à la recherche d’un style une coupe si caractéristique. Peut-être, que le motif principal de tout cela, c’est les traditions napolitaines dans tous ses aspects, l’apparence dans la société a beaucoup d’importance. Après la défaite de la branche napolitaine des Bourbons en 1858, la vie sociale à Naples se perpétue, mais sur un mode moins somptueux que par le passé. L’aristocratie reçoit des intellectuels et des artistes, la haute bourgeoisie, les membres les plus influents des corporations. L’une comme l’autre est renommée à travers l’Europe pour leur élégance. La noblesse napolitaine s’est illustrée en mélangeant avec éclat les excentricités de la mode parisienne et la sobriété raffinée du goût anglais.

Via Chiaia, via Toledo, via Medina, une clientèle internationale fréquente les boutiques les plus prisées. Les Napolitains n’ont jamais été réputés pour leur discrétion. Certes, on n’attend pas de sacrifice, ils n’ont pas non plus la vocation à devenir l’alibi des excentriques « extravagants ». Le Napolitain est très au-delà des fashion-victime qui abondent tant dans les villes européennes.

Lander (1)Le début des ateliers de tailleurs napolitains.

Pendant les années dorées du style masculin, les années 30, l’élégance de Gary Grant comme Fred Astaire et David Niven qui étaient certes, client de l’atelier du tailleur romain Caraceni. Le grand écran change la donne et leur façon de s’habiller est imitée, ou du moins tentée, par les gentlemen de l’époque. C’est précisément à partir des années 30 le connu «  italien cheap » du benchmarking d’une qualité  déplorable.

Concrètement avec l’union des tailleurs mythiques Attolini et Rubinacci, ils créent le London House référence dans les années 30. D’ailleurs, non seulement Rubinacci ne saurait se définir comme un tailleur, mais il n’en possède aucune des compétences. Le génial tailleur de cette maison c’est l’italien Angelo Blasi aujourd’hui déjà élevé au rang de mythe par les spécialistes de l’aiguille. Angelo Blasi commence à déstructurer les vestes armées anglaises pour deux bonnes raisons : une, il faut baisser les prix et l’autre il fait chaud à Naples. Cette touche unique et des prix trois fois moins chers, c’est le départ  gagnant aux tailleurs de Savile-Row. Parmi les innovations, la « soft jacket », réservé à la belle saison, puis des tissus anglais en lainages, flanelles, Cherriots, Shetlands, Saxony et tweed. À l’époque, il n’existe aucun ambassadeur de ce genre en Italie, le London House devient très vite une sorte de club ou le beau monde napolitain fait l’apprentissage des tissus anglais et une manière inédite de les porter. Ils ne portaient pas de costumes d’une qualité démontrée, mais d’un style assuré.

Pour les amants de cette coupe, il est important de renforcer l’idée qu’il n’est pas bon de généraliser après avoir parlé de la coupe napolitaine. Aujourd’hui à Naples deux écoles existent : celle de Blasi et celle d’Attolini. La différence principale consiste en ce que la coupe de Blasi est un peu plus étroite des épaules et sa veste un peu plus armée, plus typée anglaise, alors que la façon d’Attolini est un peu plus large. Les adeptes d’Attolini affirment qu’il a déstructuré la veste de Blasi, et lui retire les soft épaulettes et monte des semi-entoilés très fins, évoquant  aujourd’hui au sens figuré le « Neapolitan-style« . Attention ! Naples n’est pas monolithique il y a plus de 20 lignes d’épaules générales et différentes façons d’entoiler.

Bien que le paragraphe antérieur puisse faire « couler le sang » entre les adeptes fervents de l’un ou de l’autre courant, ce qui me semble clair consiste que l’atelier du tailleur napolitain a trouvé dans le tailleur anglais le miroir parfait pour exprimer son propre style et créer des vestes d’une énorme commodité. La commodité du non doublé, avec ou sans padding des tissus au touché exquis et d’une énorme légèreté. Celui qui a eu l’opportunité de s’habiller napolitain aura senti la sensation d’être habillée avec style et d’une forme totalement naturelle. Si c’est cela que nous cherchons. Il faut reconnaître que comme les Napolitains! Personne.

Londres mérite justice, mais, il faut l’admettre et depuis plus de trente ans c’est les ateliers napolitains qui dominent le monde de la grande mesure. Pourtant Naples ne serait pas ce qu’elle est aujourd’hui, sans un bon marketing et sans Savile-Row.

Lander (4)J’ai pris racine à Savile-Row.

Il semble approprié de rappeler que Rubinacci a envoyé un membre de sa famille pour apprendre le travail des tailleurs londoniens, qu’il exportât au London House de Naples. Le tailleur Romain, Tommy Caraceni, a été envoyé par son père dans les années 30 se former chez Henry Poole considéré déjà à cette époque l’un des meilleurs ateliers de tailleurs du monde. Arturo Cifonelli qui a appris la profession de son père Giuseppe à Rome, après sa formation à Londres, au lieu de rentrer à Rome, il a fini par ouvrir son magasin à Paris.

Si jusqu’aux années 60, les Italiens ne contrôlaient pas la technique du sur-mesure londonien. Dans les années 70, les maîtres tailleurs italiens avaient mis au point leurs techniques de la soft-jaquette devenus de véritables artistes de leurs arts. Mais, il faudra attendre les années 80 et les tailleurs Italiens plus concrètement, les Napolitains gagnent année après année une popularité aux yeux des élégants et des consommateurs de cet art. « l’atelier du Maître-Tailleur Napolitain« .

Ce n’est pas curieux que la chemiserie napolitaine sur mesure soit la plus étendue dans le monde. Ses propres habitants choisissent la chemiserie sur mesure et non du RTW à l’heure d’acheter. La chemiserie sur mesure est si étendue à Naples que ses prix sont franchement compétitifs. La puissance de la tradition est telle à Naples, que les gentlemen continuent d’aller chez le barbier et non dans les salons de coiffure. Voilà pourquoi, on n’est pas surpris que ses gentlemen aient seulement dans leurs armoires des vêtements coupés sur mesure. Et ce n’est pas parce qu’ils sont vaniteux, c’est simplement parce que cela a toujours été ainsi.

Lander (2)Ses principales caractéristiques.-

Les Italiens ont adapté le style classique anglais aux nouveaux temps en le stylisant et en déstructurant. 1975,  la révolution arrive dans un premier temps avec le messieGiorgio Armani, le « Maestro«  le symbole du luxe à l’italienne. Ses pièces maîtresses les vestes avec des lignes androgynes, rectilignes, déstructurées, qui stylisaient le style italien et un bon marketing  des tissus très légers en super’s. La coupe italienne venait de naître et l’Italie rentrait enfin dans la cour des grands.

Le style napolitain prend son essor dans les années 80. Cette coupe si caractéristique, si différente, prend ses lettres de noblesse, les finitions des tailleurs napolitains se sont répandues comme un savoir-faire à la hauteur des tailleurs de Savile-Row. Des vestes aux entoilages et triplures très légères, non doubles exceptées dans les manches. Bien que certaines de ses caractéristiques peuvent se retrouver dans la coupe italienne. C’est vraiment les lignes d’épaules napolitaines la note la plus caractéristique du « Neapolitan-style » souvent avec des poches plaquées ou inclinées avec la fameuse poche-ticket qui nous rappelle « Saville Row ». Sans  oublier, des tissus d’une légèreté et d’une commodité que seuls ses tailleurs savent choisir pour combattre les températures les plus élevées.

Ce sont précisément ces caractéristiques qui rendent l’art napolitain si attractif. Cependant, le client de l’atelier puriste napolitain doit savoir que ces costumes donnent un style sport chic. Ils manquent de formalité et il ne faudra pas s’étonner d’écouter des voix, « Mais ! C’est quoi ce costume, ton tailleur devrait être en prison » d’autres vous diront « l’art des tailleurs napolitains, n’est qu’un mythe bien loin de la réalité ».
Voilà les risques, avec des pseudos tailleurs et amis non avertis. Il est tout aussi important de rappeler que si les tissus italiens super’s ne sont pas d’une qualité exceptionnelle, ils ont été tissés pour être extrêmement agréables, frais, légers et en pensant précisément qu’ils seront cousus sans aucune doublure. Naturellement, il est sage de s’assurer une bonne coupe de la « vieille école européenne » qu’innover cette coupe avec l’un de nos tailleurs français non averti.

La coupe napolitaine obtient des résultats spectaculaires avec les costumes croisés. Si au pays de la renaissance, c’est avec élégance, style et naturel que ses propriétaires heureux, nous fond remarqué ses plis disgracieux du «Spalla-camicia», mais si caractéristiques du style napolitain.  C’est leurs façons de monter les manches sur l’emmanchure. Avec ou sans  « rollino » avec ou sans padding. Ses épaules arrondies sont très appréciées surtout en commodité.

Aujourd’hui, il est fréquent d’observer que les tailleurs napolitains préfèrent laisser les vestes, sans aucune doublure, et pour son esthétique monter des poches plaquées. D’autres préfèrent doubler les côtés et monter des poches inclinées avec poche ticket et rabat. Il est de bon goût aussi ! De monter la « barquetta » un peu plus inclinée.

Quel est le meilleur tailleur, le Napolitain ou le Londonien ? Je crois sincèrement que celui qui maintient une posture radicale vers l’une ou l’autre, il se trompe.  Parce qu’il n’y a pas qu’un seul atelier de tailleurs Italiens ou Anglais la majorité des tailleurs évoluent selon les demandes des clients aussi bien dans le style comme dans la façon. Nous ne pouvons pas oublier qu’un bon tailleur est formé pour faire la coupe que son client lui demande.

Comme je n’ai pas peur de me « mouiller », je dirais, si nous cherchons la rigueur et la netteté de lignes, la sobriété, la simplicité, la perfection, nous obéirons aux patrons londoniens. Si au contraire, nous cherchons la commodité, le style, la qualité maximale de main-d’œuvre, le naturel, des tissus légers et de qualité exceptionnelle, il me semble clair que notre option va être le tailleur napolitain.

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